la montagne ensevelie

La montagne encore ensevelie de nuit émerge dans une pale lueur parsemée d’éclairs. Des orages cinglent les nues tout là-bas dans les confins protégés, monde des pics et des  abruptes, continent où les hommes ne sont point admis. Dans ce monde  le temps est ralenti à la mesure de la montagne qui se dresse encore. Quelques Dieux et Démons y séjournent et disparaîtront un jour aussi, engloutis par les sommets usés.
Inexorablement le jour se lève sacrifiant le « ténèbre » alors que la pluie murmure sur les feuilles invisibles des grands arbres. L’espace noir, entraille des fécondations se retire doucement, pudiquement. Son empreinte révèle une âme balbutiante encore trop avide. Elle pourrait se contenter des lumières  fulgurantes du tonnerre qui rebondissent ça et là sur les courbes ombragées  des monts et des vals, mais l’obscurité dessine une route étrange que le regard ne peut discerner, guidant au delà même des mémoires stockées, trop usées et déjà croupies.
L’espace sorgue, voleur de lumière, noble obscur, raconte et reflète l’exploration d’une solitude rayonnante. Là, la piste s’annonce.
La trajectoire révélée est changeante, inattendue, fantasque, anormale, insolite. Elle vous prend par surprise. Elle peut vous briser et dans ce cas ce sera le prix à payer pour la suite du chemin. On en émergera plus clair, plus fluide, plus printanier.  L’invisible insaisissable,  invite pourtant et brille dans sa magie où la  stratégie est impossible où le chemin se forme devant au fur et à mesure que le pas se pose, un seuil  fascinant et inconnu se présente sous l’ombre inspirée, inspirante, aspirante, gardienne et inabordable.
Là les secrets en flammes brûlantes dansent, l’eau bleue des torrents remonte
les escarpements, les vents verts s’infiltrent et traversent les corps agonisants. La terre dans son immense fécondité  sous le regard impartial se change en or.
Bouger en primitif, naitre vierge, s’offrir innocent.
Nos sédiments amoncelés en graines incultes frissonnent pourtant dans le sillon du divin.
Es tu prêt  ?

        Yusen

shuyu

Shuyu pour un projet

Un soir d’été, à l’horizon incertain, le soleil se noie dans sa lumière.
L’ instant, bascule instantanément.
La  graine fragile est soudain  anéantie, dépossédée de son génie, de sa capacité.
Pourtant une nouvelle jaillira, une suivra de nouveau encore et encore. On appelle cela le temps, mais quelle vue trompeuse et dérisoire devant la vie  qui n’abdique jamais, ne s’affaiblit point. Nous reporterons continuellement la bonne fortune qui s’offre à nous immuablement.
L’Etre, semence divine est là, on a le choix de s’ y soumettre, de s’en emparer, le saisir en plein vol et cela assidûment, jusqu’à l’émergence. Le verbe reste incomplet dans la promptitude de l’apparition. Est-ce-une explosion, une éruption, un avènement éternel, un non-événement ?  
Là, dans cette semence réside un désir divin, un accouplement, une étreinte hors du temps, hors des circonstances.
La grâce semble jaillir dans l’abstraction de forme préméditée.
Elle vous prend comme l’ombre d’un grand arbre dont la cime invisible,  affranchie et libre, caresse un ciel de gloire. Le tronc,  magique et puissant, rugueux, s’enfonce par sa souche ensevelie faite de  terre, de caillasses et de rocs d’or et d’argent.
Sous le grand feuillage étalé, la parcelle éclairée suinte d’amour. Que ne puis- je la saisir, que ne puis-je l’atteindre pourtant toute proche, si évidente.
Un soupçon de souvenir se cogne dans un orage sanglant en chialant devant une porte déjà ouverte, restant infranchissable.
Des coulures amoureuses bavent sous une pression colossale, mais impalpable.
Sans rien attendre, la sage patience nourrit. Pensées et superstitions se chevauchent trahissant un cadre qui désire. La grande nature produit le pressenti. Le monde naturel, des arbres, des monts, des mers, des animaux sauvages, inspire et nous incline, telle une légère brise porteuse de mystère. Les vagues  bleues des montagnes  ondulent leur immobilité.  Les nuits sont remplies d’invisibles, les  solitudes éclairées sont révélées,  introspections salutaires comme la fleur qui se dévoile enfin car ne peut  faire autrement.  Le ciel s’étale dans sa lumière d’automne ouvrant à ce passage tant subtil, si délicat de la saison rouge où les mélancolies de la naissance émergent. Le preux chevalier, guerrier rempli de courage à l’assaut des aveuglements tenaces, des affections obstinées et des agitations convulsives, fait et refait table rase,  par un accueil, une hospitalité aimante et sans condition. La conscience pourrait naître et jaillir alors du rien éclos.
 
                                                                                                                                         Yusen

Shuyu : instant , l’espace d’un clin d’œil