L’arbre est par nature debout. La forêt, masse des multiples dressés, ondule. Respiration pleine remplissant même les apnées des troncs desséchées. Chaque présence unique éclaire le voisinage. Le tout vibre ignorant le battement commun. Les innombrables feuilles encore tendres et fragiles se frottent aux étendues infinies, nourrissant la terre d’un ciel trop éloigné.

Ainsi la petite frondaison des arcs s’est mue lors de ces derniers jours. Ce jour-ci, le ciel en soutien est clair et lumineux. La petite bâtisse, ouverte vers ce lointain toujours illusoire, rayonne d’aise. Elle s’est apprêtée avec chaleur, un brin anxieuse, mais dans cette noble excitation du feu du dedans avant l’action. Tout autour le vert de mai envoute les lieux. 

Les pétales des merisiers virevoltent dans une ondée merveilleuse. Au loin, le chant rythmé du coucou résonne, berçant les alentours pendant que les grenouilles se répondent dans la basse prairie.

Les arcs montent et descendent, c’est la danse hommage au ciel et à la terre, la grande et noble marée verticale.
Les mains affairées, allant et venant dans leur avidité, s’adoucissent peu à peu s’imprégnant de l’espace clair et pétillant au dessus des têtes. La pointe des arcs puise dans ce haut une nourriture saine et féconde. Malgré des doigts crochus, une sève généreuse s’écoule inventant la dissolution des citadelles poitrines.
Comme une forêt de mâts, chacun vogue dans cette course où la victoire, la défaite n’ont plus aucun sens et où l’instant vécu devra être reconnu : expérience vite oubliée, parfois niée, mais c’est ainsi. Le peu à peu nourrit l’urgence de la situation. 
Quelques barques prenant l’eau de toute part voguent malgré tout entrainées dans un sillage protecteur se refermant sur elles.

Mes Maîtres et Compagnon de route se tiennent là. Je perçois leur ombre bienveillante. Je goutte avec gratitude le monde mystérieux de l’un, me nourrissant de l’atmosphère et des recommandations de l’autre, me collant à la route décidée.
Je me déploie bougeant instinctivement alors que s’invente la couleur d’un chemin ignoré encore fragile et vulnérable.
Comme à son habitude le ciel sourit, mais aujourd’hui une marée enchantée se propage et une vague parfaite remplit ce petit monde.
Leur immense humanité rayonne.

Bernard